Site pour mieux connaître Dieu et l'Église catholique

Familles chrétiennes : les monastères du 3ème millénaire

Temps de lecture estimé : 6 min 30

Aujourd’hui, nous assistons à un phénomène inédit dans l’histoire de l’Église. Pour la première fois, le cœur historique de la Foi chrétienne, l’Europe, abandonne presque complètement la matrice religieuse et culturelle qu’elle avait adopté depuis environ 1300 ans, lorsque l’Empire romain est devenu chrétien.

Le parallèle avec le tournant du 2e millénaire

Nous assistons à un phénomène proche de celui des Xème et XIème siècles européens : les campagnes comme les villes étaient pratiquement revenues au paganisme originel. Toute idée de culture avait déserté les quelques élites restantes. Les seigneurs devaient être des chefs de guerre capables de défendre leurs territoires et leurs gens, et pas du tout des lettrés. Le clergé vivait comme le peuple, souvent avec femme et enfants, et sans formation religieuse particulière.

Famille priant

La culture tant religieuse que profane se concentrait presque exclusivement dans les monastères. C’est là que restaient les parchemins anciens, ceux de la Grèce d’Aristote tout comme ceux de la Bible, c’est là que dans le silence des scriptoriums, les moines recopiaient patiemment les documents indispensables à la transmission de la Foi et de la culture. Cette entreprise était faite dans la foi pure, puisque rien n’annonçait la fin de cet âge de ténèbres.

Aujourd’hui, en Europe, en ce début du Troisième Millénaire, nous vivons une situation qui revêt beaucoup de points communs avec cette période.

La Révolution : fin de la dominance sociale du christianisme.

La Foi vécue de manière sociologique, portée par la société, est en cours d’extinction. Dès le XVIIIème siècle, l’athéisme a commencé à prendre corps en France, atteignant un pic avec la volonté révolutionnaire d’éradiquer toute forme de religion. Dès lors, le christianisme cesse d’être la matrice sociale qu’il était depuis le Vème siècle.

Les années 60-70 : fin de l’influence culturelle du christianisme

Depuis les années 1960-1970, seules (ou presque) les personnes qui ont vécu une expérience personnelle de rencontre avec le Christ ou qui ont été portées par un milieu familial très chrétien sont de véritables acteurs de la Foi. On a beaucoup plus affaire à de fortes individualités qu’à de larges groupes organisés. Les sanctuaires et les grands événements type JMJ ont la cote, la pratique quotidienne discrète et durable beaucoup moins.

Depuis les années 1960, de la même manière, la véritable culture et la raison ancrées dans la vérité ont déserté progressivement le grand public et les cercles officiels : universités, écoles, mondes politique et médiatique, etc.

Notre époque : l’extinction quasi-totale de la référence chrétienne et de la véritable culture

Aujourd’hui, l’Europe est un champ de ruine en matière religieuse et culturelle. La religion est devenue pour l’immense majorité des gens un concept  totalement étranger à leurs préoccupations quotidienne, et qui n’a aucunement sa place dans les grandes décisions de leur vie. C’est plutôt une sorte de survivance folklorique d’une période lointaine, la plupart du temps très mal connue voir même complètement inconnue.

Quant à la culture, si elle apparaît encore dans le patrimoine artistique extraordinaire laissé par les générations passées, elle disparaît presque complètement dans les écoles comme dans les cercles de décision. C’est le divertissement de masse qui la remplace. Secret Story fascine beaucoup plus que La Princesse de Clèves. La cicatrice d’Harry Potter, dans la jeune génération, est bien plus célèbre que le nez de Cyrano. Les écrans saturent complètement les capacités intellectuelles des enfants et adolescents. Le bavardage et la musique incessante détruisent toute réflexion authentique. Comme le dit le philosophe Henri Hude : « Pour penser sérieusement, à partir d’un certain niveau, il faut écrire et réfléchir silencieusement. »

La solitude et le silence sont les ennemis jurés de l’époque. Il faut un véritable courage pour s’extraire du torrent de bruits et d’images déversés en permanence par les médias.

Où trouver la Foi et la vraie culture chez les laïcs ?

Alors aujourd’hui certes les séminaires, universités catholiques et monastères restent des îlots où la vraie culture et la Foi sont pleinement vécues et transmises.

Mais ces réalités sont lointaines pour le commun des chrétiens. Sommes-nous condamnés, nous les chrétiens fervents et soucieux de mettre Dieu à la première place dans toutes les réalités de notre vie, à respirer une fois tous les six mois en passant quelques jours dans un monastère ou en suivant quelques cours à l’université catholique la plus proche ?

C’est alors que nous pouvons esquisser une vision audacieuse : voir les familles authentiquement chrétiennes comme les nouveaux monastères du Troisième Millénaire.

Dans un livre paru en l’an 2000, jamais publié sur papier, Daniel Rabourdin étudie les forces de renouveau aux États-Unis et établit ce parallèle audacieux, en étudiant les familles qui se lancent dans l’aventure de l’école à la maison, école au service de la vraie culture mais aussi de la Foi, cela va sans dire.

Aux États-Unis comme en Europe, de nombreux parents ne veulent plus confier leurs enfants à des structures où la violence se déchaîne, où l’éducation sexuelle est frontalement opposée à la doctrine de l’Église, où la Foi chrétienne est violemment et ouvertement critiquée par les professeurs et où la véritable culture est inexistante voire franchement combattue, avec les désastres et délires pédagogiques, spécialement en langue et en histoire.

Les familles, refuges de la transmission

Dès lors, ce sont sur les familles chrétiennes que repose pour la plus grande part du formidable enjeu de la transmission de la Foi et de la culture aux générations futures.

Tout comme les monastères il y a plus de mille ans, il faut accepter que, pour l’instant, la Foi chrétienne et la vraie culture se concentrent dans ces familles, où elles peuvent pleinement s’épanouir, à l’abri de l’hostilité ambiante. La meilleure preuve en est l’éclosion de vocations en leur sein. Aujourd’hui encore, 80% des vocations sacerdotales et religieuses sont issues de familles chrétiennes ferventes. Il est illusoire d’envisager un renversement de tendance à moyen terme : tout prouve que l’effondrement de l’influence de la religion chrétienne dans la société européenne est un phénomène qui va continuer dans les années à venir, il suffit de regarder la baisse du nombre de baptême d’enfants.

Une « retraite » salutaire

Dès lors, l’enjeu est de taille : comment protéger les enfants de nos familles de l’atmosphère délétère que nous respirons en Europe, et spécialement en France où la Foi chrétienne est moquée de toutes parts et reléguée violemment dans la sphère privée ?

Les monastères pratiquent le retrait volontaire du monde, entendu au sens de l’agitation mondaine qui empêche ou limite fortement la contemplation et l’étude sérieuse.

Les familles chrétiennes d’aujourd’hui sont appelées à pratiquer une forme de retrait si elles veulent être « dans le monde » sans être « du monde ». Former et encourager sur la durée des enfants et adolescents à la prière contemplative quotidienne est un défi que seules les familles chrétiennes peuvent relever. Aucune paroisse ou aumônerie ne le peut, si ferventes soient-elles. De même, l’école, même privée catholique, n’est plus capable de fournir un cadre où l’enfant puisse dans le calme et la réflexion sérieuse, devenir un homme selon Dieu, prompt à la prière et suffisamment formé pour prendre les grandes décisions de son existence de manière éclairée, selon Dieu et pouvant donc lui procurer un bonheur authentique, durable et fécond.

L’apport de l’école à la maison

L’école à la maison est une possibilité très intéressante, permettant aux familles de conserver cette idée de « petits monastères ». Les parents sont libres de transmettre la vraie Foi et la vraie culture, sans l’interférence de l’air du temps, mais dans le respect du véritable art de l’éducation, celui qui plonge ses racines dans un temps aussi reculé que celui d’Aristote et Platon. Les enfants peuvent hors du temps d’étude proprement dit sortir pour toutes sortes d’activités enrichissantes, au contact de la nature, des musées, des bâtiments religieux et profanes qui ont fait notre pays et qui témoignent du courage et du talent des générations passées. Trempé dans cette histoire sainte et profane qui est l’une des plus riches du monde, un enfant ainsi formé se sentira tout simplement fier d’être chrétien et français, sans fanatisme ni honte, mais avec une force inébranlable et une volonté d’aller de l’avant pour promouvoir et faire connaître ce merveilleux héritage. De plus, ils développent une sociabilité beaucoup plus souple que celle qu’ils auraient connu à l’école, ils sont avec d’autres enfants élevés à la maison qui, comme eux, peuvent étudier et découvrir en toute quiétude, ils sont en contact avec beaucoup plus d’adultes que leurs professeurs et peuvent ainsi acquérir une maturité qui fait défaut à la plupart des enfants scolarisés.

Il est vain de prétendre que cette manière de faire est dangereuse, elle existe déjà depuis de nombreuses années et a fait ses preuves. Les résultats scolaires sont bien meilleurs que ceux des écoles classiques et les enfants bien plus épanouis.

Ce retrait que l’enfant aura vécu pendant de nombreuses années, sans être gavé de télévision et de jeux vidéos, protégé de la pornographie et d’une vision dégradante de la sexualité, avec une distance suffisante pour porter un discernement sur les réalités du monde où il vit, sera pour lui un don inappréciable lorsqu’adulte, il sera immergé dans un monde profondément hostile à ses valeurs et manières de vivre, un monde proche par beaucoup d’aspects de l’univers communiste des pays de l’Est jusqu’en 1989.

Il y aurait encore bien d’autres choses à dire sur cette vision des familles chrétiennes vues comme les petits monastères du Troisième Millénaire. Je laisse donc largement ouverts les commentaires, pour vos réactions et questions par rapport à cette question cruciale de la transmission de la Foi et de la culture, au milieu d’un monde qui semble très bien s’accommoder de la disparition du religieux comme réalité vécue.

Voir aussi : Moines et moniales, des évangélisateurs ?

Retour au blog Saint Jean-Paul II

Précédent

Em, l’enfant sidéen mal aimé

Suivant

Benoît XVI renonce à sa charge

  1. MarsB

    école à la maison = bonne idée

    Je pense moi aussi que l’école à la maison serait le meilleur environnement pour les enfants. Je crois que les écoles sont nées quand les parents avaient confié leurs enfants à des personnes qui ont étudié et se consacraient à transmettre la connaissance et la culture, mais actuellement en qui pourrait-on avoir confiance encore? Les moeurs publiques sont tellement corrompues que je préfère transmettre moi-même (avec ma future épouse) la connaissance et la culture catholique à mes enfants.

  2. nathalieD

    je veux bien envisager l’école à la maison mais

    le plus gros point d’interrogation? qui me  reste après cette lecture est “comment permettre à l’enfant le contact avec les autres enfants ce n’est pas le fait de savoir qu’il y a ailleurs d’autres enfants comme lui qui vivent l’école à la maison qui va lui donner d’être confronté à la différence et lui permettre de la voir, de la vivre ,d’y réagir avec les éléments qu’il aura reçu et intégré ? cela me fait penser qu’il faut sans doute un juste milieu pourquoi pas partager en deux et surtout avoir du temps avec les enfants pour dialoguer et transmettre ce que nous voulons transmettre.

    Je me souviens d’un documentaire sur les infiltrés à bordeaux . J’en ai été completement retournée , il montrait une manière extrême dans une école hors contrat des enfants qui chantait des chansons nazis … etc … un prêtre qui parlait d’une différence de race … des violences sur les autres différents d’eux … j’espère surtout que ce genre de choix de faire l’école à la maison ne produise pas à l’inverse de ce qui est crainds de l’école si je peux résumer ainsi passer de la tolérance à tout pour gommer la différence à l’intolérance qui exclue la différence ? recherchons peut-être un juste milieu , un juste équlibre .Comment réfléchissons à plus tard . nathalie

    • Cat-modératrice

      Tu parles d’école Nazi et de

      Tu parles d’école Nazi et de parents qui apprendraient à leurs enfants à rejetter la différence, mais est-ce que tu sais pourquoi l’école à la maison est autorisée en France et pas en Allemagne ? Parce qu’en Allemagne c’est interdit depuis le nazisme, et ils ne l’ont pas ré-autorisé ensuite. Ce sont les régimes totalitaires qui ont plus confiance en l’État qu’en les parents pour l’éducation des enfants.

      Peut-être qu’il y a quelques cas de parents intégristes qui ne veulent pas que leurs enfants soient au contact des autres, mais en général les parents qui font l’école à la maison sont des gens beaucoup plus ouverts que la moyenne, et leurs enfants rencontrent des personnes de toutes sortes, et sont beaucoup plus ouverts que s’ils avaient été formatés par une bande de copains où on ne peut être accepté que si on a les dernières chaussures Nike à la mode.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Site sous WordPress & Thème par Anders Norén